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Les Guerres de Lucas : Interview de Laurent Hopman

Laurent Hopman, scénariste des Guerres de Lucas à répondu à nos questions sur son ouvrage. Voici son interview.
Laurent Hopman © Crédit photo : Deman
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À l’occasion du 40e BD Boum qui s’est tenu à Blois du 17 au 19 novembre dernier, j’ai pu rencontrer Laurent Hopman, le scénariste du livre Les Guerres de Lucas et le co-fondateur des DEMAN Éditions. Cette interview vous permettra de comprendre les objectifs de l’auteur derrière cette bande-dessinée sortie le 4 octobre dernier et vous donnera peut-être envie de vous plonger dans l’ouvrage.

Bonjour Monsieur Hopman, ravi de vous rencontrer après le visionnage du premier film de Georges Lucas : THX-1138. La diffusion de ce métrage s’inscrit parfaitement dans la thématique du livre que vous avez écrit : Les Guerres de Lucas, livre qui raconte la création du premier film Star Wars.

Sur vous et votre lien à Star Wars

Vous avez découvert La Guerre des Étoiles à sa sortie en 1977. Quel a été l’élément le plus marquant du film selon l’enfant que vous étiez à cette époque ?

Ce qui m’a le plus marqué lorsque j’étais petit, c’est les sabres laser ! C’était vraiment une idée spectaculaire, vraiment incroyable… Et puis les monstres, aussi. Même si les séquences où on les voit sont assez brèves, ça m’a beaucoup marqué. La scène de la cantina, notamment. C’était aussi l’une des premières fois où je voyais quelque chose de violent au cinéma. Le bras coupé par Obi-Wan, c’est assez gore. Mais j’ai adoré ! (rire)

Han Solo était aussi mémorable. C’est un personnage génial et, curieusement, j’ai préféré Han Solo à Luke, pourtant le héros. Pour mes copains, c’était pareil.

Laurent Hopman

Après coup, la saga Star Wars est-elle votre préférée parmi la multitude de sagas qui existent aujourd’hui ?

Star Wars reste ma préférée, même s’il existe d’autres sagas intéressantes. C’est souvent la première expérience qui reste la plus forte. Après, il y a plein de choses fantastiques, comme Le Seigneur Des Anneaux. Mais j’étais beaucoup plus âgé lorsque j’ai découvert l’univers de Tolkien, alors l’émerveillement n’était peut-être pas aussi fort que quand j’ai découvert Star Wars enfant.

Laurent Hopman

Sur la production du livre

Pourquoi avoir choisi ce format de bande-dessinée ? Ce type de sujet ne se prête-t-il pas davantage au format reportage ou à un article de magazine ?

La BD permet une liberté totale. On peut montrer, mettre en scène des choses qui n’ont jamais été filmées, pour lesquelles il n’existe pas d’archives. On peut vraiment mettre en scène toutes ces situations sans contraintes, ce qui est fantastique. Tous les points de vue sont possibles, la narration est complètement libre. Pas de contrainte de budget, pas de contrainte de droit. On peut librement développer l’histoire que l’on souhaite raconter.

Laurent Hopman

Les DEMAN Éditions sont assez récentes et vos livres s’intéressent à relater des faits réels dans vos bandes-dessinées. Pensez-vous que votre ouvrage puisse plaire à des enfants ?

Ça peut être lu par des enfants, car il n’y a pas de contenu inapproprié, mais je pense qu’il vaut mieux avoir au moins une quinzaine d’années pour bien comprendre le contexte et les références. Si on ne sait pas qui est Coppola par exemple, si on ne sait pas un minimum comment fonctionne Hollywood et le monde du cinéma, des studios, ce sera sans doute un peu obscur pour un enfant. Le livre s’adresse principalement à des adultes.

Laurent Hopman

Vous avez créé votre propre maison d’édition. Est-ce comme Georges Lucas pour avoir une liberté totale sur vos productions ?

Oui, on peut dire ça ! C’est important lorsque l’on raconte une histoire de pouvoir être libre de choisir le dessinateur, le nombre de pages, le type de publication, est-ce que ce sera un livre relié ou broché, etc. C’est très appréciable de pouvoir être libre de donner corps à sa vision telle qu’on l’imagine. C’est un vrai privilège.

Laurent Hopman

La bande dessinée est quasiment entièrement en Noir et Blanc. Est-ce lié à une volonté de faire ressembler l’ouvrage à un storyboard ?

La filiation avec le storyboard est clairement présente. Renaud Roche, le dessinateur qui a fait le livre est notamment un storyboarder qui travaille pour l’animation. Il a ce style « storyboard » que l’on adore et qui se fait généralement en noir et blanc. C’était un style très dynamique, très rythmé. Et commec’est un roman graphique destiné à un public adulte, qui sait appréhendait le noir et blanc, on a complètement assumé ce parti pris, très adulte justement. Cela permettait aussi d’avoir des touches de couleurs par endroit, lorsque Renaud choisissait de souligner certains moments clés de l’histoire.

Laurent Hopman

De quoi ça parle ?

La bande dessinée s’intitule Les Guerres de Lucas : Pour quelles raisons ?

Pour George Lucas, réaliser Star Wars est un long chemin de croix. C’est une succession de batailles, littéralement. C’est ça les Guerres de Lucas, c’est tout ce qu’il a dû affronter pour arriver à donner vie à son projet. Toute création est difficile et, au cinéma et à Hollywood en particulier, c’est vraiment une succession d’épreuves et de compromis. Un parcours très, très éprouvant. On n’imagine sans doute pas, en tant que spectateur, à quel point il faut batailler et à quel point il est difficile de conserver sa vision, son idée de départ. Pour n’importe quel projet qui implique des centaines de personnes, il faut à chaque étage, réussir à convaincre, réussir à obtenir les financements nécessaires. Même à la toute fin, quand Star Wars est enfin achevé,on découvre que les cinémas n’en veulent pas…C’est terrible ! Le film est là, il est prêt, il fonctionne et il faut encore obtenirla validation des exploitants. C’est épuisant et on le voit dans le livre : étape après étape, rien n’est jamais acquis. C’est une véritable guerre.

Laurent Hopman

L’ouvrage à beau mettre en avant Georges Lucas, de nombreuses autres personnes ont leur heure de gloire, à commencer par Marcia Lucas, sa femme. Qui sont les acteurs qui ont le plus contribué au succès de Star Wars selon vous ?

Il y a Marcia, qui est un personnage de premier plan. Elle a une acuité remarquable qui lui permet de dire à George Lucas s’il est dans la bonne direction ou s’il se trompe. Elle est de très bon conseil et elle a assez de personnalité pour s’opposer à lui et se faire entendre. George écoute les autres aussi. Mais il ne suit pas forcément leurs conseils. Il a cependant cette capacité assez étonnante à encaisser les critiques sans s’effondrer. Sous ses dehors fragiles, il est extrêmement solide ! Il invite donc les critiques de ses amis, même s’il ne les prend pas systématiquement en compte. Marcia est la seule qu’il écoute véritablement. En ça, elle a été très importante parce qu’elle a su le remettre sur les rails, lui donner de très bonnes idées, sur la construction du scénario notamment. Elle a aussi apporté son talent de monteuse en contribuant directement, et de manière décisive, à l’œuvre finale. Autre personnage central,Alan Ladd Jr, qui était le directeur de la créa chez la Fox à l’époque. Lui a été, dans la catégorie costard cravate (comme les appelle Lucas), le seul à véritablement croire en Lucas. Le seul à vraiment sentir quelque chose de différent chez ce réalisateur dès American Graffiti. Il perçoit que ce metteur en scène a du talent et il va aller très loin pour le soutenir, jusqu’à risquer son job. Il a poussé pour que le film aille jusqu’au bout. En cela, c’est vraiment un personnage crucial.

Laurent Hopman

Les Guerres de Lucas réunit beaucoup d’anecdotes de tournage du premier film. Y a-t-il d’autres anecdotes qui n’ont pas été retenues dans la BD ?

Le livre aurait pu faire 1000 pages et ne pas contenir toutes les choses que j’aurais aimé raconter ! (rires). Il y a énormément de choses très intéressantes et très drôles sur chaque élément de l’histoire. La première anecdote qui me vient à l’esprit —mais c’est vraiment très anecdotique—, c’est une anecdote que je trouve très amusante. Le poster de Star Wars, qui était l’un des premiers produit dérivés du film (parce que c’était facile à produire) a une histoire très marrante.

Le n°1 des ventes de poster aux États-Unis à cette époque, c’était le poster de Farrah Fawcett en maillot de bain. Depuis plusieurs années, elle était indétrônable, en top des ventes. Personne n’arrivait à rivaliser avec ce poster sexy… jusqu’à ce que celui de Star Wars soit mis en vente ! Quand il est sorti, il a balayé Farrah Fawcett en réalisant des ventes cinq fois supérieures ! Ça a été l’un des premiers indicateurs du fait que Star Wars était en train de devenir un phénomène.

Laurent Hopman

Renaud Roche s’illustre par une patte graphique très épurée mais néanmoins transmettant beaucoup d’émotions. Comment a-t-il été choisi ?

Pour commencer, c’était un fan de Star Wars, chose cruciale. Il fallait quelqu’un qui comprenne les codes et qui soit motivé pour s’engager dans un projet de si longue haleine. C’est tout de même deux ans de travail pour réaliser un album comme celui-ci, qui fait 200 pages. Avec Julien Derain, mon associé chez Deman, on était fan du travail de Renaud parce qu’il a plusieurs qualités qui sont essentielles pour la BD: il est extrêmement fort sur l’expressivité des personnages, c’est-à-dire qu’il arrive à retranscrire la personnalité des gens, de ce qu’ils ressentent avec justesse. Il le fait à travers l’expression du visage mais aussi à travers la gestuelle, l’attitude corporelle. Sur chacun de ses dessins, on comprend ce qui se passe presque sans avoir à lire la bulle. Sa manière de dessiner Lucas en est un exemple. L’attitude corporelle du personnage est comme un baromètre. Plus il est courbé, plus ses épaules tombes, moins ça va !

Renaud a aussi une autre qualité essentielle : un vrai talent pour la mise-en-scène. C’est quand même un livre dont l’action se situe très souvent dans des pièces, entre des gens qui se parlent. Il y a peu de scènes d’action à proprement parler. Renaud parvient à rendre vivantes toutes ces scènes de dialogues. Il est très inventif sur les angles de vue et le découpage.

La fluidité de son trait permet de créer du mouvement, aussi. C’est une approche très cinématographique, en somme, et ce sont les raisons pour lesquelles nous adorons son travail !

Laurent Hopman

Le livre est un succès critique et commercial, prévoyez-vous de potentielles suites ?

Il y aura une suite qui est en cours de réalisation. Le prochain tome traitera de l’Empire Contre Attaque et des prémices d’Indiana Jones. C’est une histoire qui est un peu moins connue que celle du premier film mais qui est tout aussi dramatique d’un point de vue scénaristique et ça va être encore plus dangereux pour Lucas que le premier…

Laurent Hopman

Pour lire notre article critique sur les Guerres de Lucas, c’est ici.

Sur Star Wars

Quel est votre personnage préféré dans la saga ?

Quand j’étais petit, avant que l’Empire Contre-Attaque ne sorte, il y avait eu une opération promotionnelle où l’on pouvait adhérer à une sorte de fan-club Star Wars. J’étais petit, je ne me souviens pas de tous les détails ! On pouvait envoyer un coupon ou de l’argent en échange d’une promesse de recevoir un pack d’accessoires pour les figurines Kenner. Le pack contenait des armes et d’autres éléments. J’ai fantasmé pendant des semaines en attendant le colis ! Mais finalement, le jour où le paquet est finalement arrivé, il ne contenait pas du tout les accessoires promis ! Ce que j’ai reçu, c’est une figurine de Boba Fett, personnage que je ne connaissais pas. Et pour cause, l’Empire contre-attaque n’était pas encore sorti. Alors, je ne savais pas qui il était, la figurine n’avait pas d’emballage, elle était juste glissée dans un sachet plastique transparent, sans aucune indication. Certes, j’étais un peu déçu de ne pas avoir eu les accessoires pour mes autres figurines, mais je trouvais toutefois le personnage incroyable. Et puis après, quand je l’ai vu dans le film, j’ai compris qui il était et c’est devenu mon personnage préféré pendant des années !

Mais outre Boba Fett, je suis toujours aussi fan de Han Solo !

Laurent Hopman

Que pensez-vous de Star Wars sous l’ère Disney ? Un contenu a-t-il attiré votre attention ?

Je suis impatient de voir ce que va donner le film de Taïka Waititi parce que cela peut potentiellement être quelque chose de plus audacieux. C’est ce que j’attends de Star Wars aujourd’hui. J’attends qu’un film soit donné à un réalisateur, un auteur, et qu’il se l’approprie, qu’il y mette sa patte.Ce dont souffre Star Wars depuis un certain temps maintenant, c’est d’une absence de vision et d’audace. C’est moins grave de se rater en essayant quelque chose de différent que de s’engluer en reproduisant ad nauseam la même recette.

Laurent Hopman

Avez-vous transmis votre passion pour Star Wars à vos enfants ou à d’autres membres de votre famille ?

J’ai un petit garçon qui a vu tous les Star Wars et qui trouve ça très bien mais je me rends bien compte que ça n’est pas le même attachement que celui que j’ai connu.Pour lui, c’est un film à grand spectacle comme un autre. Et il préfère Le Seigneur des Anneaux dans ce genre…

Laurent Hopman

Conclusion : Le livre en vaut-il le coup ?

Merci beaucoup pour les réponses à ces questions : Je vous donne le mot de la fin pour donner envie aux lecteurs des Chroniques Star Wars de lire votre Bande-Dessinée.

Ce que l’on a essayé de faire avec ce livre, c’est de renouer avec l’émotion que les fans de de Star Wars ont ressenti en découvrant la première trilogie, de revivre ces moments incroyables qui ont donné naissance à un film qui a changé le monde.

C’est avant tout une aventure humaine et une trajectoire exceptionnelle. Une histoire incroyable qui n’est pas trop belle pour être vraie.

George Lucas a été très décrié depuis des années, de manière très excessive, comme si des générations de fans avaient eu besoin de tuer le père. Si cet ouvrage peut contribuer à réhabiliter un temps soit peu le formidable visionnaire qu’il a été et sa contribution fantastique au monde du cinéma, ce sera formidable.

À travers toutes les recherches que j’ai effectuées pour écrire ce scénario, j’ai découvert un homme avec de grandes qualités humaines. Honnête, droit, généreux. Le grand public n’en a pas forcément conscience.

Et pour les créateurs, les artistes, les gens qui prennent des risques pour inventer quelque chose, quoi que ce soit, l’histoire de George Lucas est aussi une source d’inspiration. Persévérance, détermination et droiture. George Lucas a réussi envers et contre tout sans se perdre dans le processus. En cela, je le trouve assez admirable.


Notre avis sur le livre :

À la rédaction, nous avons adoré le livre et collaborer avec les DEMAN Editions pour vous proposer ces articles. Si vous voulez en découvrir plus, n’hésitez pas à vous procurer la BD, elle en vaut la peine. De plus, les fêtes de Noël approchant, cela peut-être une bonne idée de mettre ça sous le sapin, nan ?

Les Guerres de Lucas


Auteur :

Laurent Hopman

Illustrateur :

Renaud Roche

Parution :

04/10/2023

éditeur :

Éditions Deman

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